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Le taulier de la "Boîte à images" (voir http://laboiteaimages.hautetfort.com) a lancé un jeu qui consiste à écrire un texte selon des règles bien précises.

Pour le premier jeu (voir son billet du 1 janvier 2006), le texte doit répondre à une image donnée et [1] "revêtir la forme d'un journal intime ; [2] mesurer 1 500 signes maximum ; un signe étant une lettre, une ponctuation ou une espace ; [3] contenir 17 phrases ; ou bien contenir 4 phrases ; [4] être publiée au plus tard le 3 janvier 2006 à 23h 59."


Vilhelm Hammershøi,
"Interiør, ung kvinde set fra ryggen", 1879-1916,
Huile sur toile, 60,5 x 50,5 cm

 

Ci-dessous ma contribution un peu "à la manière de", pour la Boîte à images, le 3 janvier 2006

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Tes paupières se sont closes un instant tandis que de tes lèvres filait un soupir délicieux et puis, vivement, tu t'es détournée dans un sursaut de sagesse, me présentant ton dos comme un rempart, sans savoir, peut-être, la fragilité de l'agrafe presque défaite de ta robe, la douceur de ta nuque tiède, la tendresse de tes mèches folles, la langueur de ta taille souple, la grâce de ta silhouette... On dirait que tu oublies que me soustraire à ton regard ne pourra jamais me rendre invisibles le myosotis de tes yeux, aussi vif que celui qui pousse chaque année dans le recoin, au bas des marches du perron, l'élégant ourlet d'églantine de ta bouche, le fil délicat de ton nez, l'arrondi de ton menton qui vient, tel un bijou, faire pendant au bombé de ton front clair et compléter ce délicat ovale que mes mains aiment tant épouser ; alors tu peux bien me tourner le dos, va, ton image reste gravée profondément et rien, tu entends, rien ne peut t'effacer. Demain matin, tu trouveras ce petit moment dans ton service pour venir m'inonder de ton sourire innocent, sous le prétexte de m'apporter un thé ou m'emprunter un ruban de cheveux, demain matin je sais que tu viendras jouer les tentatrices encore une fois, comme tu le fais depuis si longtemps ; mais demain, ah ! demain, je te promets, petite compagne de jeux, que mes baisers viendront couvrir cette nuque chérie ! Et au diable la rigidité des conventions et le conformisme de ma trop digne famille !

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